Mon chien impacte tous les jours le fonctionnement de mon cerveau. J’ai réalisé à quel point c’était le cas après m’être plongé dans l’épaisse littérature scientifique. Et ce que j’y ai découvert m’a bluffé. Les amis, si vous avez un chien, sachez qu’il modifie bien plus votre cerveau, vos humeurs et votre santé que vous ne l’imaginez. Dans ce article je vais vous faire un résumé de ce que j’ai appris, et je vais vous présenter brièvement quelques-unes de ces découvertes étonnantes. On va voir comment les chiens aident à soigner les malades avant de découvrir comment des chercheurs ont enregistré le cerveau de personnes passant du temps avec ces chiens, et comment cela a impacté leur comportement et leur santé. Mon chien s’appelle Baloo, il partage notre vie depuis plus de 9 ans. Bien sûr j’avais conscience qu’il me faisait du bien ainsi qu’à toute ma famille, dont il fait finalement intégralement partie. Quand il est heureux, son bien-être est contagieux, on sourit, on se sent bien. Quand il est malade, on a mal pour lui et on perd notre bonne humeur. Que notre Baloo impacte nos émotions, on s’en doutait un peu, c’était intuitif, j’en convient tout à fait. Mais récemment, la science est allée plus loin que de simplement confirmer cette intuition que tu as sans doute déjà eu, si tu as un chien à tes côtés. Plusieurs études ont été publiées récemment, des travaux qui précisent un peu plus tous les bienfaits des chiens sur notre bien-être. Et en particulier il y a cette étude coréenne sortie en mars 2024 qui démontre à quel point notre cerveau est impacté par notre chien. Les expériences impliquant des interventions d’animaux dans des hôpitaux ou dans des écoles se font de plus en plus nombreuses dans le monde. Et la quasi-totalité des rapports vont dans le même sens : les chiens sont de précieux alliés. J’épingle pour commencer une étude qui indique que c’est particulièrement vrai chez les patients qui se rendent aux urgences hospitalières. Les urgences on s’y rend pour diverses douleurs que notre médecin traitant ne peut traiter. Sur place l’environnement est généralement anxiogène et l’attente peut parfois être longue, ce qui accentue le ressenti de la douleur chez les patients. Au cours d’une étude menée au Canada, des chiens ont été autorisés à rendre visite à des patients admis aux urgences d’un hôpital. Les chercheurs se sont rendus plusieurs jours dans la salle d’attente de l’hôpital de Saskatoon, au Canada , et ont interrogé un panel de 211 personnes. Certains jours, un chien de thérapie était présent dans la salle d’attente avec son maître. En attendant d’être reçu par un médecin, les patients devaient remplir un questionnaire et évaluer leur niveau de douleur, de stress et de bien-être sur une échelle de 1 à 10. Ensuite, ils passaient 10 minutes en compagnie du chien, et répondaient au même questionnaire 20 minutes plus tard. Un autre test similaire a été organisé avec un second groupe de patients, qui n’a pas pu profiter de la présence du chien. Tout comme le premier groupe, ces personnes ont répondu deux fois au même questionnaire, à 30 minutes d’intervalle. Cette expérience a permis aux chercheurs de démontrer que la présence du chien a distrait les patients en les faisant penser à autre chose, ce qui a drastiquement diminué leur sensation de douleur, les a aidés à évacuer le stress et à améliorer leur moral. D’ailleurs pour l’anecdote, l’un des chiens s’appelait Murphy, et cet épagneul de 6 ans faisait tellement bien son boulot qu’il a été surnommé « Dr. Murphy » par le personnel de l’hôpital. L’utilisation d’animaux dans le domaine médical remonte à plus d’un siècle. Freud, fondateur de la psychanalyse, a été l'un des premiers thérapeutes à introduire son chien de compagnie dans ses séances de thérapie, parce qu’il constatait que ses patients étaient plus disposés à communiquer en raison de la présence de son animal. Les chiens ont ainsi prouvé à de multiples occasions leur rôle bénéfique lors de diverses formes de thérapie. Par exemple, les chiens d’assistance guident les patients à travers certaines activités physiques et les incitent à jouer afin de les aider à redévelopper leur motricité ou leur coordination. Mais leur action sur le moral des patients est énorme, surtout lorsqu’il s’agit d’enfants. Pour cette raison, des chiens sont parfois accueillis au sein de certaines unités d’oncologie pédiatrique où ils égaient les journées des enfants touchés d’un cancer. Dans cette étude de 2018, 24 enfants âgés de 8 ans en moyenne ont passé 30 minutes à jouer avec un Golden retriever, et ce, à trois reprises. Les médecins ont mesuré différentes variables pour estimer le niveau de stress de l’enfant, avant le passage du chien, juste après son départ, et quelques heures après plus tard. Et tenez-vous bien, les résultats sont limpides : diminution de la douleur ressentie par l’enfant, réduction du stress et une tendance à l’amélioration des symptômes dépressifs. Et un moral meilleur c’est aussi plus de courage pour affronter la thérapie. Autre résultat surprenant, même le personnel soignant a bénéficié de la visite du chien, puisque les chercheurs observent moins d’anxiété et une tension plus basse chez les infirmiers et infirmières qui ont accompagné les visites des chiens. Les chiens peuvent aussi accompagner les thérapies suivies par des patients atteints d’une forme d’autisme, en venant jouer le rôle de thérapeute associé. L’animal est là pour promouvoir la qualité de la relation de collaboration entre le patient et le thérapeute. Il facilite l’établissement de la confiance et le sentiment de sécurité, qui permettent ensuite au patient de s'ouvrir plus rapidement et de bénéficier davantage de sa thérapie. C’est prouvé, les petits patients coopèrent mieux durant les conversations avec le thérapeute, après quelques minutes seulement passées en compagnie du chien. Aux Etats-Unis, l'Université de Yale a décidé de recruter des maitres-chiens qui avaient pour mission d’aller à la rencontre des étudiants pendant la semaine d’examens et a pu démontrer leur efficacité à réduire leur anxiété. Le simple fait de laisser les étudiants caresser les chiens semblaient avoir les effets désirés, ceux-ci témoignant que cela leur avait fait du bien et qu’ils se sentaient moins stressés. Depuis, cette démarche a été répliquée un peu partout aux états unis et en dehors. Les chiens ont été tellement efficaces qu’une autre Université américaine, localisée dans le Wisconsin, est devenue en 2014 la première université aux États-Unis à adopter un chien de thérapie à plein temps sur son campus. Comme mon Baloo, il s’agissait d’un golden retriever comme Zoey, qui était initialement formé pour interagir avec les gens dans les maisons de retraite, les hôpitaux, et dans les situations d'intervention en cas de catastrophe. L’université a même ensuite adopté un deuxième chien, nommé Sage. Voilà la liste des travaux est longue mais démontre très souvent que la présence d’un chien dans un environnement stressant aide à apaiser le patient et améliore la qualité des soins reçus. Tous ces travaux ont adopté une approche globale : je veux dire que les chercheurs ont démontré l’amélioration de l’humeur des personnes avait été amélioré par rapport à ce qu’il était avant d’avoir passé du temps avec le chien. Mais on ne savait finalement pas si toutes les activités réalisées avec le chien étaient aussi bénéfique que les autres. Vaut-il mieux que le patient caresse le chien, joue avec lui, le promène, lui fasse la toilette ou simplement des calins? On ne savait finalement pas ce qui était le plus efficace. Et bien ça, c’était l’objet de la dernière étude dont je veux te parler, celle menée récemment par des chercheurs coréens de l’Université de Konkuk. Eux, ils ont enregistré les réactions qu’a notre cerveau en fonction des diverses interactions qu’on a avec notre chien, comme quand on le caresse ou quand on l’emmène en balade. Pour mieux comprendre comment ces différentes activités affectent notre cerveau, les chercheurs ont recruté 30 participants adultes. Chacun des 30 volontaires s’est vu proposé de passer du temps avec un chien, un chien qui avait été dressé et qui était donc le même pour tous les participants. Ils étaient invités à réaliser différentes interactions avec ce chien : il y avait d’abord la rencontre, puis 7 activités étaient proposées: jouer avec un objet qu’il fallait tenir en main, donner des friandises au chien, prendre des photos avec lui, caresser le chien, lui prodiguer des soins basiques, l’emmener en promenade et enfin lui faire des câlins. Pendant que les participants réalisaient ces différentes activités, ils devaient porter des électrodes d'électroencéphalographie afin d’enregistrer l'activité électrique de leur cerveau. Après chaque activité, les chercheurs posaient quelques questions pour tenter d’évaluer leur état émotionnel, tel que le participant la décrivait : par exemple je me sens détendu, je suis excité, je suis optimiste … Les chercheurs pouvaient donc mettre en relation ce que décrivait le participant et ce que leur électroencéphalographe enregistrait. Les scientifiques ont montré que les participants qui jouaient avec le chien ou qui le promenaient, étaient dans un état d'éveil détendu. Leur cerveau se plaçait en mode relaxation. Un état que certains thérapeutes recherchent chez leur patient. Par contre les chercheurs notent que l’impact du chien sur le cerveau n’est pas le même pendant le toilettage, pendant des séances de caresses ou de jeu. L’appareil démontrait que ces patients-là étaient très concentrés. un état qui augmentait leur attention et améliorait leur performance à réaliser une tâche particulière. Ces participants ont aussi déclaré se sentir beaucoup moins fatigués, moins déprimés et moins stressés après chacune des huit activités liées aux chiens. Ces résultats étaient quasi-unanimes pour tous les participants. Cette étude est vraiment chouette, mais je vais me permettre tout de même une petite critique. Tous les participants sont des volontaires non rémunérés qui ont répondu à l’appel lancé par les scientifiques. Donc de base, s’ils se sont porté candidat à ce type de test, bein on peut imaginer qu’ils aiment les animaux. Aucun de ces participants ne craint les chiens, et ça et bien ça a probablement biaisé un peu les résultats. Car en effet, tout le monde n’est pas à l’aise avec les chiens. Tout le monde n’est pas à l’aise avec les chiens je disais, on peut facilement imaginer qu’i l existe des personnes chez qui ces bien faits ne seraient pas observés, des personnes qui auraient donc conduit à des résultats tout différents. Tous ces travaux sont précieux. Ils vont permettre par exemple de mieux éduquer les chiens d’assistance afin de renforcer les comportements qui aident au mieux les humains qui en ont besoin. Attention cependant, l’utilisation de chiens thérapeutiques doit se faire avec précautions pour respecter l'hygiène, les allergies, la sécurité des participants, mais aussi le bien-être des chiens. La formation tant du chien que de son maitre est essentielle et l’intervention du chien doit être consentie et encadrée légalement. Mais ce qui est certain c’est qu’avec ces résultats, les chercheurs espèrent que des soins thérapeutiques plus ciblés puissent être mis en œuvre pour favoriser la relaxation des patients, aider à leur stabilité émotionnelle, à accroitre leur concentration, leur créativité, ou leur volonté de travailler à leur rééducation.
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AuteurFrançois Verheggen, Professeur de Zoologie, Université de Liège Archives
Novembre 2024
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