Les grands singes sont souvent considérés comme les animaux les plus intelligents après les humains. Pourtant, les récentes découvertes des scientifiques nous poussent à braquer les projecteurs sur d’autres bêtes. Des volatils mal aimés, incompris et surtout largement sous-estimés. Mais si les corbeaux ont longtemps été considérés comme rusés, leur intelligence semble bien plus avancée que nous ne l’aurions jamais cru possible. En 2002, un groupe de scientifiques de l'Université d'Oxford ont observé avec émerveillement Betty, une jeune femelle corbeau, ramasser avec désinvolture un morceau de fil dans sa cage, puis utiliser un objet proche pour plier ce fil à une extrémité, le transformant en un outil à crocheter. Ce que Betty ne manqua pas de faire, puisqu’il lui a directement servit à hisser à elle un petit récipient contenant un délicieux morceau de viande, glissé à l’intérieur d’un tube en plastique. À l’époque, l’exploit de Betty avait suscité l’étonnement. Comment ce corbeau a-t-il résolu si spontanément un problème aussi complexe ? Ces observation suggéraient qu’elle était capable d’acrobaties mentales semblables aux nôtres. C'était, selon les gros titres, un corbeau incroyablement intelligent. Sauf que Betty n’était pas aussi spéciale qu’on le pensait au premier abord. 20 années plus tard, on comprend bien mieux encore à quel point les corbeaux sont tous doués pour résoudre des problèmes nécessitant de transformer, d’une manière ou d’une autre leur environnement, notamment en se fabriquant un outil. Ce que Betty a démontré en laboratoire, se passe en fait tous les jours dans la nature. Anna Braun, une chercheuse autrichienne a voulu comparer l’intelligence des corneilles noires avec celles de chiens et celle de jeunes enfants au cours d’une expérience simple. Sur un écran tactile deux symboles s’affichent, l’animal appuie sur le symbole de son choix, un symbole donne de la nourriture, l’autre rien du tout (et le système se bloque pour un temps sur un écran rouge). L’écran peut ainsi proposer des duos de symboles multiples, mais si un symbole qui donne de la nourriture en donne toujours. Il aura fallu près de 70 tentatives à des chiens pour comprendre la logique de ce test, et appuyer sur le bon symbole pour avoir le bonbon. Quant aux corbeaux … ils ont compris bien plus vite la logique, après seulement quelques tentatives, soit tout aussi rapidement que de jeunes enfants. Des résultats comparables aux grands singes. Ainsi par exemple des recherches ont montré que les corbeaux calédoniens sont des artisans capables de confectionner quantité d’outil complexes. Ils détectent la présence d’une larve dodue d’un scarabée, logée dans le tronc d’un arbre. Quelques instants d’observation suffisent à l’oiseau pour comprendre que la larve est trop bien enfoncée dans le du tronc que pour pouvoir l’attraper avec son large bec. Et qu’il lui faut pour solutionner ce problème complexe, un outil. Un objet mince, suffisamment long et coudé, pour déloger la larves de sa galerie. Heureusement, les corbeaux calédoniens peuvent compter sur leur capacités d’observations et surtout leur excellente mémoire. Si bien qu’ils connaissent par cœur les environs. Les chercheurs notent que les corbeaux faisant face à ce type de problème ne perdent pas de temps, ils semblent très bien savoir où chercher le matériel nécessaire à la fabrication de l’outil. Un buisson, localisé à quelques centaines de mètres, peut fournir les longues branches, souples et irrégulières. Sur place le corbeau sait ce dont il a besoin. Il sectionne l’élément de bois parfait à l’aide de quelques coups de becs bien placés. Il arrache ensuite chaque tigette et chaque feuille. Enfin, il plie ce futur nouvel outil en son centre. Et la manœuvre n’est pas simple, même pour un humain : L’oiseau coince la tige entre le sol et sa patte, saisit une extrémité dans son bec et relève doucement la tête afin de faire fléchir le bois sans le casser. Les chercheurs notent que plus le corbeau est vieux, moins il a de chance de casser la branche. Car les corbeaux acquièrent de l’expérience dans l’artisanat au cours de leur vie. Outre le fait d’avoir l’intelligence nécessaire pour analyser le problème et en trouver une solution, outre le fait d’avoir une excellente mémoire pour se rappeler de la localisation du matériel et d’avoir l’agilité pour fabriquer l’outil, il faut aussi au corbeau les capacités cognitive pour l’utiliser correctement ! Là encore les corbeaux montrent toute leur intelligence : ils posent l’outil sur une branche proche du trou de la larve, le maintiennent en place à l’aide de l’une des pattes pour éviter que l’objet ne tombe ne tombe, puis le saisissent par une extrémité avec le bec, et il l’introduisent dans l’orifice. Et ce n’est pas tout, il faut encore pratiquer quelques mouvements de tête, pour faire apparaitre la larve. Et après avoir capturé l’insecte? Ils jettent l’outil ? Non bien sur, ils sont plus malins que cela. Jeter un outil aussi précieux serait … bien bête, car il peut toujours servir ! Une équipe de chercheurs allemands ont démontré que les corbeaux mettaient leur outils précieux en lieu sûr. Exactement comme quand vous rangez votre paire de lunettes dans leur étui, ou votre précieux stylo dans le tiroir du bureau. Les corbeaux identifient dans leur environnement un lieu sur où déposer leur attrape-larve. Et ils doivent être discret quand ils l’y cachent, car il n’est pas rare que d’autres corbeaux observent la scène, avec la ferme intention de dérober l’objet précieux. Oui parce que quand on est intelligent, on est aussi capable de développer de stratégies comme le vol, et même celles de la recherche de cachettes. A côté de tout ce que l’on vient de voir : solution de problème, confection et manipulation d’outil, mémoire, et stratégie à long terme, je voulais aborder aussi avec vous les fantastiques organisations sociales des corbeaux. L’intelligence ouvre la porte à beaucoup de choses. Les corbeaux vivent en communauté d’individus qui se connaissent et se reconnaissent. Ils se rassemblent en des lieux particulier pour se nourrir, jouer ou se reposer. Ils souviennent de ce qu’ils ont fait avec tel ou tel autre corbeaux au cours des jours précédents. Ils évitent les corbeaux avec qui ils ont eu des différents et se rapprochent plus aisément d’individus avec lesquels ils ont partagé un repas. Les corbeaux d’une même population peuvent compter les uns sur les autres. Le biologiste John Marzluff, de l’Université de Washington, a fait une drôle d’expérience. Il s’est promené sur son université en portant un masque d’homme des caverne. Et il a noté que 20 à 30 % des corbeaux criaient en le voyant. Ensuite il a capturé quelques corbeaux, tout en portant son masque. Il a noté que durant les deux années qui ont suivi, tous les corbeaux hurlaient en le voyant, mais seulement quand il se promenait avec son masque. Les corbeaux retiennent les visages humains. Ils identifient leurs amis et leurs ennemis. Et ils exploitent cette reconnaissance faciale en faisant passer le mot auprès des autres corbeaux, qui apprennent et se passe le mot du danger associé à un visage. C’est incroyable !
Les corbeaux ont plusieurs cris d’alarme, ces cris destinés à prévenir les autres corbaux de a présence d’un danger. En tout les scientifiques ont idenifiés près de 250 cris différents. Chaque individu possède en outre deux intonation de cris : un très sonore pour la communication avec les membres de leurs communauté et un plus doux qu’ils réservent aux membres de leur famille. Des subtilité langagière qu’on ne retrouve que chez les mammifères les plus évolués. Le sens de la famille est d’ailleurs très développé chez les corbeaux, car les chercheurs ont démontré le rôle des parents dans l’éducation des petits, que ce soit pour identifier les nourritures les plus adaptées à leur santé, les stratégies les plus adaptées pour obtenir cette nourriture, ou encore les dangers auxquels ils doivent faire attention. Ainsi par exemple les corbeaux se saisissent de fruits à coques, volent pour en estimer le poids, puis prennent la hauteur qu’ils estiment nécessaire pour briser la coque, une fois qu’ils auront lâché le fruit et qu’il se soit éclaté au sol. Avec cet article, nous avons découvert que le Corvidae font preuve d’un niveau d’intelligence insoupçonné. Ils analysent des problèmes et élaborent des solutions. Ils font usage de leur excellent mémoire pour localiser ce dont ils ont besoin, ils manipulent avec habilité des objets de leur environnement. Les corbeaux sont très sociaux également, leur langage est complexe, ils collaborent les uns avec les autres, et font la différences entre des congénères et des membres de leur famille proche. J’espère donc que vous n’interpréterez plus un croassement comme un signe de mauvais augure. Mais comme ce que c’est réellement : c’est-à-dire le langage d’une espèce très intelligente.
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AuteurFrançois Verheggen, Professeur de Zoologie, Université de Liège Archives
Novembre 2024
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