Des coucous il y en a une 50aine espèces, et aujourd’hui j’ai envie de vous parler de deux d’entre elles : le coucou gris, et le coucou geai. Et quand on parle des coucous, on est obligé de parler de leur habitudes de squatteurs. Les éthologues parlent de parasitisme de couvée. Rien de neuf sous le soleil vous me direz, c’est d’ailleurs dans tous les bons livres nature : les coucous, ce sont des profiteurs, des squatteurs, des parasites de nid ! Ils se prennent le bec avec le voisinage, volent dans les plumes des passereaux, et finissent par se faire traiter de tous les noms d’oiseaux. Commençons par le coucou gris, le plus commun chez nous en Europe de l’Ouest. C’est un oiseau d’une trentaine de centimètres. C’est un migrateur lui aussi. Et si je dis cela c’est parce que je vous parlais justement des lemmings dans mon post précédent. Le coucou, il migre donc, il change d’habitat, alternant l’Europe et l’Afrique en cours d’année. C’est à son retour en Europe que débute la période de reproduction. Problème, le coucou gris est pas très bricoleur … en fait, il est parfaitement incapable de se fabriquer un nid. Mais ne vous moquez pas, c’est pas sa faute, l’évolution ne l’a simplement pas sélectionné pour ses talents à confectionner un nid douillet. Pourtant le nid, c’est quand même une sacrée belle invention pour déposer des œufs, les couver et protéger les oisillons. Il lui en faudrait tout de même un. Alors au lieu de se retrousser les manches, notre coucou se perche sur une branche et surveille les environs. Le coucou écoute donc le chant des oiseaux du voisinage. Il recherche le chant qu’il a entendu longuement pendant sa propre enfance. Un chant comme celui d’une rousserolle, l’un des oiseaux qui reçoit fréquemment la visite du coucou gris. Et lorsque la femelle coucou en repère un couple, elle s’en rapproche. Elle recherche leur nid et vient y déposer discrètement un œuf, qui a les mêmes couleurs, les mêmes textures, que les œufs déjà présents. A leur retour, les rousserollesn’y voient que du feu. Le développement de l’oisillon coucou est plus rapide que celui des jeunes rousseroles, si bien que l’œuf parasite éclot souvent avant ses voisins. L’instinct de l’oisillon lui souffle qu’il requerra toute l’attention de ses parents adoptifs, et qu’il ne peut donc pas se permettre de partager la nourriture avec ses frères et sœurs de couvée. Il doit donc impérativement se débarrasser d’eux. Le coucou attend que ses parents d’adoption partent en balade, et débute un travail très macabre : A l’aide de son dos, il pousse les œufs vers le bord du nid jusqu’à les faire tomber au sol. Il doit interrompre ses efforts à chaque fois que l’un de ses parents adoptifs se rappliquent … faudrait pas se faire griller ! Après plusieurs heures d’effort, il arrive habituellement à ses fins. Ses parents adoptifs ne se posent pas trop de questions, il leur reste un petit et ils comptent bien lui apporter tout le soin qu’il … mérite ?!? Alors inlassablement ils font des allers-retours pour attraper des insectes et les enfoncer dans la gueule grande ouverte de l’oisillon, qui aussitôt en redemande. Sa croissance est très rapide, si bien qu’en une poignée de semaines, il se retrouve à l’étroit dans le nid de ces passereaux. Des chercheurs espagnols et suisses ont fait grand bruit en publiant dans la célèbre revue Science leurs travaux sur le coucou geai. Ce coucou-là, il ne remonte pas jusqu’à chez nous pour se reproduire, il arrête son voyage sur les côtes méditerranéennes. Lui, il parasite spécifiquement les nids des corneilles noires. Autre différence notable avec le coucou gris : l’oisillon ne se débarrasse pas de ses frères et sœurs adoptifs. Les parents corneilles tentent donc de satisfaire à la fois l’appétit du coucou et celui de leur propre descendance. Le coucou geai ne semble pas être juste un squatteur de plus. Non, apparemment, il paie son loyer. Les chercheurs ont observé des dizaines de nids de corneilles et ont noté que ces nids sont régulièrement visités par les faucons pèlerins, qui se nourrissent des oisillons des corneilles. Ils notent cependant que si un coucou geai se trouve dans le nid des corneilles, les faucons avaient tendance à repartir le bec vide, sans rien, zéro, nada, pas d’oisillon. L’hypothèse des scientifiques c’est que le coucou y est pour quelques chose dans la protection du nid. Alors je vous passe tous les détails de l’étude, mais ils ont démontré que lorsqu’un faucon atterri à proximité du nid de corneilles, le coucou geai stresse tellement, qu’il relâche une odeur nauséabonde. Cette odeur, nos éthologues l’ont reproduite au laboratoire. Oui on ne le dit pas assez, mais il y a des gens payés pour fabriquer des parfums qui sentent le pet de coucou stressé. Avec leur bouteille de parfum, les chercheurs sont retournés sur le terrain, et ils en ont aspergé de nombreux de nids de corneilles. Ensuite, ils se sont cachés et ils ont observé ce qui se passait au nid. Les chercheurs se sont évidemment surtout intéressés aux faucons qui s’approchaient des petits dans les nids, et vous me voyez venir : ils ont démontré que ce parfum faisait effectivement fuir les faucons pèlerins!
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AuteurFrançois Verheggen, Professeur de Zoologie, Université de Liège Archives
Novembre 2024
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